Les enfants de Sylvie Brazès, la secrétaire de l’université tuée en janvier 2010, n’acceptent pas que Quing Ye soit déclaré irresponsable pénalement, et espèrent un procès.
S’il est déclaré irresponsable, on aura du mal à l’avaler. C’est comme si c’était lui qui devenait la victime." Julie Brazès, une étudiante perpignanaise de 22 ans, et son frère Guillaume, 29 ans, viendront jeudi devant la cour d’appel de Montpellier, pour demander une nouvelle expertise psychiatrique de l’homme qui a tué leur mère. "On veut montrer aux magistrats que c’est une affaire qui nous tient à cœur. On espère que Quing Ye soit reconnu responsable de ses actes
Quing Ye est cet étudiant chinois de 29 ans qui, le 13 janvier 2010, a tué à coups de couteau Sylvie Brazès, 49 ans, la secrétaire du département de sociologie de l’Université de Perpignan, et blessé deux professeurs et un étudiant. Depuis, la justice s’interroge sur cet acte, en privilégiant l’acte d’un malade mental. Qui a donné, juste après son arrestation, des explications irrationnelles :
"Ce matin j’étais désespéré, extrêmement désespéré, j’ai entendu qu’en Chine j’allais avoir la peine de mort, que j’allais être condamné. Je suis sorti de chez moi pour décompresser, j’ai mis deux couteaux dans un sac. Je suis allé à l’Université pour rencontrer quelques professeurs qui sont en rapport avec ma condamnation en Chine pour discuter avec eux", avait expliqué Quing Ye juste après son arrestation.
Le psychiatre qui l’examine alors déclare son état incompatible avec une garde à vue. Désormais, le jeune homme est interné à l’Unité des malades difficiles (UMD) de l’hôpital psychiatrique de Montfavet, près d’Avignon. Le juge d’instruction de Perpignan ne l’a mis en examen pour assassinat et tentative d’assassinat que le 24 mai dernier, soit plus de deux ans après les faits. Et a demandé, après cet interrogatoire, une expertise complémentaire "pour déterminer si les déclarations de Quing Ye peuvent relever d’une stratégie de manipulation de l’institution médicale et/ou judiciaire".
Manipulateur ? Dissimulateur ? Julie Brazès en est convaincue. Pendant les cinq mois qui ont précédé le drame, elle a côtoyé au quotidien le jeune homme : elle était étudiante en sociologie, dans la même promotion. "J’étais la fille de la secrétaire, la déléguée de classe." Comme d’autres étudiantes, elle avait noté ses attitudes insistantes de dragueur un peu maladroit. "J’ai la fâcheuse tendance, depuis dix ans, de piquer les copines des autres", lui lâche-t-il un jour. Au fil des semaines, plusieurs filles reçoivent des textos de sa part. "On n’a jamais su comment il a eu les numéros. Un jour je l’ai envoyé un peu paître", se souvient Julie.
Courant octobre 2009, les rapports se tendent. "Il passait parfois ses cours à regarder fixement les élèves. Il suivait des filles après des cours." Puis tient des propos inquiétants : "Je vais disparaître de la fac à cause de vous.» Julie l’avoue : «On se demandait s’il était suicidaire.» Sa mère lui dit de faire attention. "Je pensais à un syndrome persécuteur/persécuté", note la jeune fille. Les étudiantes s’en ouvrent leurs professeurs, et Quing Ye, après une entrevue avec un médecin, accepte un court séjour à l’hôpital psychiatrique.
Il en ressort avec un traitement, mais surtout... un sujet pour un devoir universitaire. "C’était plutôt bien écrit, il a eu une bonne note", se souvient Julie. "C’est là qu’on peut se rendre compte que c’est un manipulateur. Il a profité d’être un patient pour être sociologue. Comme un acteur, il s’est imprégné d’un rôle", souligne son frère Guillaume. Par la suite, Quing Ye va aussi se montrer très pressant avec certains de ses professeurs, parce qu’il craignait d’avoir de mauvaises notes, et Syvie Brazès va devoir faire barrage. "Je sais qu’il y a eu une altercation avec ma mère en décembre." Le 13 novembre, cette dernière a sans doute payé de sa vie le fait de lui avoir refusé un contact avec des enseignants, alors en réunion.
"Ce serait bien qu’il y ait un œil neuf sur cet homme, et que l’expert visionne aussi son audition en garde à vue", souligne Me Gérard Deplanque, l’avocat des enfants Brazès. "Il faut qu’on ait une certitude sur cette stratégie manipulatoire."
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