«Il n'y a pas de fumée sans feu », lance, mi-provocateur, Ludovic Emanuely, directeur d'une agence de mise en relation professionnelle à Vincennes, invité à assister à l'atelier recherche de la gendarmerie sur le thème du traitement de la rumeur : implications en termes de communication, de droit, de sécurité et d'ordre public. « Pour contrer une rumeur, il faut en lancer une autre ! » poursuit-il.
Ce n'est pas tout à fait l'avis du général d'armée Marc Watin-Augouard, directeur du centre de recherche de l'École des officiers de la gendarmerie nationale. « L'être humain va se trouver demain dans une bulle de plus en plus informationnelle. Nous serons dans l'instantanéité et je pense que nous devrons être actifs sur les réseaux sociaux. »
À Bordeaux, au mois de mars dernier, les plus folles hypothèses ont circulé sur la disparition des étudiants Maxime Le Bot et Vincent Zecca. Les internautes, via les réseaux sociaux, ont souvent versé dans l'irrationnel. La rumeur d'un trafic d'organes avec les pays de l'Est a tourné en boucle.
La rumeur fait le buzz
Dans les collèges et les lycées, chacun y allait de son commentaire. Dans certains établissements scolaires, des professeurs ont même suspendu des cours afin d'apaiser les esprits. « Est-ce qu'il y a eu une information auprès des scolaires ? » interroge le journaliste Jean-Claude Bourret, modérateur de l'atelier recherche. « Pas directement », se souvient le lieutenant-colonel Gwendal Durand, chef de la section veille médias au Service des relations publiques de la gendarmerie et commandant de la compagnie de Bordeaux Judaïque jusqu'en août dernier. « Localement, le quotidien "Sud Ouest" n'a fort heureusement pas servi de caisse de résonance à ces rumeurs. »
Sur le Net, chaque rumeur faisait le buzz. Et les internautes se sont déchaînés lorsque l'hypothèse d'un « serial pousseur » a été lancée. « On n'entendait parler que de cela », commente le général de division Bernard Pappalardo.
Sur la Toile, à cette époque, les mots « bizarre » et « inquiétant » revenaient sans cesse. « Nous devrons modifier notre action face à des réactions collectives totalement irrationnelles, confie le lieutenant-colonel Gwendal Durand. Et, pourquoi pas, créer un blog spécial pour casser la rumeur. »
« Une technique offensive »
La gendarmerie envisagerait donc de mettre en place une arme anti-rumeur, bien que celle-ci puisse être parfois porteuse de vérité. « L'objectif est de faire retomber la pression », rappelle le colonel Joël Ferry, chargé de projet à la sous-direction de la police judiciaire de la Direction générale de la gendarmerie nationale. Lui aussi suggère que soient intégrés les réseaux sociaux, « une technique offensive pour donner les informations utiles aux concitoyens ».
Selon Agnès Auboin, vice-procureur, secrétaire générale du parquet de Bordeaux, le rôle de la justice est de travailler dans un cadre fixé par la loi. Et d'indiquer que lors des noyades, la police bordelaise a systématiquement rendu compte aux familles qui ont été informées. « Les investigations de la brigade criminelle ont été remarquables et ont confirmé la thèse accidentelle. »
« Mais la rumeur ne s'éteint jamais », souligne le colonel Joël Ferry. « Nous devons nous y préparer, anticiper, pour casser toute action périphérique et empêcher la théorie du complot », insiste le lieutenant-colonel Alexis Bourges, chef de la section relation avec les médias au Sirpa.
À Bordeaux, la rumeur a été tenace.
http://www.sudouest.fr/2012/11/19/la-gendarmerie-sort-son-arme-anti-rumeur-882713-7.php
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