Il n'a manifesté aucune émotion, pas la moindre réaction. Egal à ce qu'il a montré de lui-même tout au long de ces trois jours de procès d'assises, Wesley Jacquemin, 32 ans, est resté impassible à l'annonce de sa condamnation à 8 ans de prison ferme pour avoir involontairement causé le décès de sa compagne en 2005.
«POUR moi, ça ne sera jamais assez, mais au moins il est reconnu que par ses coups, il a tué notre fille. » Après 6 ans et demi de procédure, c'était hier, pour la maman d'Aurélie Lellig, décédée à l'âge de 23 ans, le 10 novembre 2005, l'heure de la délivrance. « Je souhaite qu'il s'en sorte, mais le plus difficile c'est de voir qu'il n'a pas eu un mot pour notre fille. »
Comment ? Pourquoi est décédée Aurélie ? Il aura fallu de nombreuses expertises pour que soit établie de façon (in)certaine les causes de la mort. La tâche n'aura pas été aisée pour les jurés à l'heure du jugement…
Car si pour Me Fabienne Anton-Romankow, l'avocate de la famille d'Aurélie, les causes du décès ne font pas de doute, la défense n'avait pas le même regard. « Aurélie est décédée d'un stress dû de façon certaine aux violences infligées par son compagnon qui ont entraîné des troubles cardiaques et la mort subite… », a ainsi affirmé, rapport d'expert à l'appui, Me Anton-Romankow. « L'asphyxie, comme on veut le faire croire du côté de la défense, n'est pas la cause du décès… On a mis plus de 6 ans à y arriver, mais les choses sont certaines. Le décès d'Aurélie est dû aux coups portés par Wesley Jacquemin. »
A l'heure des plaidoiries, l'avocate a insisté sur la « douleur insoutenable » des parents, une mère qui n'est plus que l'ombre d'elle-même, un père qui a voulu mourir… « Ce que tout le monde craignait est arrivé. Tout le monde était inquiet pour elle. On savait qu'il y avait de la violence quotidienne. On savait qu'il la frappait. Chacun espérait qu'elle le quitterait un jour… Mais à ce moment-là, on ne savait pas qu'il fallait craindre pour sa vie. »
Me Jean-Luc Martin, bâtonnier de Châlons-en-Champagne, l'avocat de leur petite fille, âgée d'un an au moment du drame, a rappelé qu'en « droit français, on est responsable de ce qu'on fait. On est responsable du résultat ! Le résultat, ça a été précisément l'objet des expertises. La conclusion est claire, nette et précise et ne souffre pas de discussion. Le lien entre les violences et la mort subite est évident. La violence de la dispute a causé le décès d'Aurélie ».
« Il n'a pas tué Aurélie »
Un avis catégorique loin d'être partagé par Me Antoine Flasaquier, avocat de la défense, qui n'a pas manqué de souligner la complexité du dossier.
« Il est toujours difficile de juger un homme, d'autant plus lorsque les choses ne sont pas cernées, évidentes… C'est d'autant plus difficile que dans ce dossier se pose la détermination de la cause de la mort. Il y a un problème médical, une difficulté qui s'est ressentie tout au long des débats… Wesley Jacquemin n'a pas le sentiment d'avoir tué quelqu'un. Et ce que disent les experts n'est pas si évident. C'est une violente dispute, mais pour autant elle reste habituelle. Au moment, où il s'en va, elle est vivante… Aurélie est morte de mort naturelle. La grande difficulté c'est que les coups n'ont pas causé directement sa mort… mais indirectement. » Et de revenir sur les contradictions des différentes expertises : un décès par asphyxie, une mort subite d'origine cardiaque liée au stress…
« C'est une mort naturelle… Qui a des causes, mais c'est une mort naturelle… Il a toujours dit, ça ne peut pas être mes gifles qui l'ont tuée, parce que c'était mes gifles habituelles. C'est désagréable à entendre, mais c'est honnête… Dans ce dossier, je ne détiens aucune vérité… On parle du stress, mais on ne connaît pas la journée d'Aurélie. On sait qu'elle a fumé du cannabis. On ne sait pas non plus quelle en est la conséquence sur le stress. On ne peut avoir aucune certitude dans ce dossier… »
Hier, la cour, après en avoir délibéré pendant deux heures, a estimé que par ses violences, il avait bien contribué au décès de sa jeune compagne. Suivant les réquisitions de l'avocat général (lire par ailleurs), Wesley Jacquemin a été condamné à 8 ans d'emprisonnement ferme, ainsi qu'à une interdiction de séjour de 5 ans dans l'arrondissement de Vitry-le-François. Il a désormais 10 jours pour faire appel du jugement.
http://www.lunion.presse.fr/article/marne/sept-ans-dun-amour-destructeur-huit-ans-de-prison-ferme
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