mardi 6 mars 2012

De sa cellule, il s'exhibe sur Facebook

Condamné à 25 ans de réclusion l'an dernier, Romain Leroy est réapparu dans la vie de ceux qui cherchaient à l'oublier par la grâce du réseau Facebook, bel et bien propice aux exhibitions narcissiques.

LE 1er avril 2008 à Rethel, Romain Leroy, avec la complicité de Cédric Lutz, avait tué Jonathan Sugot, 23 ans, en le balançant dans un fleuve alors qu'il était ligoté et bâillonné. Trois ans plus tard jour pour jour, au terme d'un éprouvant procès mené par la cour d'assises des Ardennes, le premier nommé avait écopé de 25 ans de réclusion ; le second, pâle homme de main en quête de valorisation, à 18 ans derrière les barreaux.
Pour la famille du jeune Sugot, figée depuis le printemps 2008 dans un cercle de douleur infernal et insoluble, les peines prononcées permettaient d'entamer un long chemin vers, si ce n'est la quiétude, un deuil apaisé.
Mais à l'époque des réseaux sociaux virtuels et omniscients, difficile, parfois, de ne pas se retrouver nez à nez avec un passé qui ne passe pas. On imagine facilement le sentiment d'impuissance, de rage peut-être, qui a dû transpercer la famille Sugot quand celle-ci, alertée par un ami du frère de la victime, a découvert le compte Facebook de Romain Leroy, garni de quelques photos où celui-ci prend soin d'exhiber sa volumineuse musculature. Puisqu'aucun paramètre de confidentialité n'est activé sur ce profil, n'importe qui peut admirer la plastique de « Molotov », surnom hérité de quelques exploits rugbystiques accomplis pendant l'enfance, ou apprendre qu'il compte le « fool contacte » (sic) dans ses loisirs.
Sous le pseudonyme de « goliath rm », Romain Leroy pose fièrement dans sa cellule - forcément - grâce à des photos manifestement prises d'un téléphone portable, objet interdit dans toutes les prisons de France.

« Culte narcissique »

« A le voir fanfaronner dans sa cellule, ce sont forcément des souvenirs qui reviennent, lâche, dégoûté, le père de Jonathan Sugot. ça fait mal au ventre ». Lorsque son épouse a découvert à son tour le « mur » de Romain Leroy, les larmes ont coulé. « J'ai perdu mon fils à cause de cet abruti et le voir là, en train de continuer à bafouer les quelques lois qu'il peut encore bafouer, franchement, ça arrache les tripes », poursuit-il. Le ton de la voix ne monte pas. A ce stade du chagrin, il n'a ni haine ni colère à laquelle se raccrocher. Seulement le souvenir et le vide.
On en oublierait que les photos de Romain Leroy, par ces arrière-plans chargés, pourraient, avec un peu plus de distance, être perçues autrement : dire ce que peuvent être ces existences réduites à quelques mètres carrés, partagées aujourd'hui par plus de 65 699* personnes en France (record historique).
Mais non, avant ça, résonnent inlassablement les paroles de Philippe Herbelot, l'expert qui, le 31 mars dernier, avait délivré à la barre du tribunal cette analyse de Romain Leroy : « Il éprouve une sorte de jouissance à avoir mis un coup de poing à la victime, une ''patate de forain'' comme il dit […] Il est dans le culte narcissique de son corps, de sa force […] Vu sa manière d'investir sa musculature, j'ai l'impression qu'il l'affûte pour en faire une arme. Il m'a également dit : ''Vous verrez aux assises comme je suis costaud''. Il a des défenses telles qu'il est à l'abri de tout tourment psychique ».
Des propos que Romain Leroy, bien involontairement, n'a que trop parfaitement résumé sur ces clichés

http://www.lunion.presse.fr/article/ardennes/de-sa-cellule-il-sexhibe-sur-facebook

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