Interrogée mardi sur l'aspect de l'arme, l'une des vendeuses du magasin avait répondu : «Pour moi, ce pistolet était vrai». Un seul acteur de ce braquage n'avait pas pris la mesure du danger le jour des faits. Il s'agit du boucher qui a fait irruption dans la bijouterie et qui a mis en fuite les deux hommes avant de permettre l'arrestation de l'un des deux. Le commerçant avait même lancé à Mokhtar Benabderrahmane qui se trouvait alors en possession du pistolet : «Tu crois me faire peur avec ton jouet !»
Reste qu'hier, à l'heure de la plaidoirie de la partie civile, on n'en savait guère plus sur qui a échafaudé quoi. Lundi, lors de l'examen de personnalité des deux accusés, la psychologue Roselyne Tessier a bien évoqué la «pensée frustre» de Mokhtar Benabderrahmane et ses «conduites transgressives».
Des pères absents
Pour autant, le plus jeune des deux hommes n'avait pas fait parler de lui jusqu'à ses 17 ans. Il a même suivi une scolarité plutôt brillante jusqu'en première... avant de tout laisser tomber. Ce qui n'est pas le cas de Foad Razzouki, déjà condamné à huit reprises dont deux fois à 3 et 6 ans de prison. Pas tout à fait un enfant de chœur. «Il utilise son intelligence de façon opportuniste», souligne l'experte psychologue. Alors faut-il aller chercher dans l'histoire de ces deux hommes pour comprendre leur passage à l'acte?Mokhtar Benabderrahmane n'a pas ou peu connu son père, qui est reparti vivre en Algérie. Sa mère, elle, souffre de la maladie de Wilson, une maladie neuro-dégénératrice qui provoque délires et hallucinations. Trouvant refuge chez ses grands-parents, Mokhtar Benabderrahmane aurait pu passer son Bac, mais quand ses aïeux partent trois mois en Algérie en 2011 le jeune homme est livré à lui-même. Et plonge dans la petite délinquance.
Le parcours de vie de Foad Razzouki n'est guère plus chatoyant. Un père qu'il n'a pas vu depuis 20 ans, une mère qui élève seule ses quatre enfants et qui tire le diable par la queue pour boucler les fins de mois. Foad Razzouki n'a aucun diplôme. Il vit de petits boulots et «d'affaires malhonnêtes», explique l'oncle de Mokhtar Benabderrahmane, qui reste convaincu que son neveu «a été manipulé après s'être retrouvé seul».
«L'un ne domine pas l'autre»
Cette version du «loup» et de «l'agneau» ne convient guère à Me Jean-Pierre Cabrol, l'avocat des parties civiles, qui, à l'heure de sa plaidoirie, anticipe déjà sur les arguments que développera aujourd'hui la défense. «C'est à parts égales de responsabilité que ces deux-là ont agi», estime l'avocat toulousain. L'un ne domine pas l'autre. Ils ont conçu le braquage ensemble», explique-t-il,rejetant l'idée que Mokhtar Benabderrahmane ait pu être une simple marionnette. Et de rappeler que dans ce «scénario violent et agressif» la «violence vient surtout de Benabderrahmane (Ndlr : celui-ci était le porteur de l'arme). A ce moment-là, la violence vient de lui, il ne faiblit pas. Ce n'est pas un suiveur, c'est un braqueur au même titre que Razzouki. Chacun sait ce qu'il a à faire», estime l'avocat avant de brosser un portrait peu reluisant du dernier. «Le courage de M. Jacobi (Ndlr : le boucher qui a permis l'interpellation de Benabderrahmane) contraste avec la lâcheté de M. Razzouki «qui prend la fuite au guidon du scooter et sauve sa peau en abandonnant corps et biens son complice». Quant aux aveux de dernière minute de Razzouki, ils ne sont là que pour faire «amende honorable. C'est encore une dernière lâcheté. Il veut toujours sauver sa peau». Et de conclure à l'adresse des six jurés : «Au moment de votre délibéré, je vous demande de considérer le traumatisme et le bouleversement subis par Virginie et Corinne. Leurs vies ont basculé au moment de ce braquage, alors que pour eux c'est une anecdote !».http://www.ladepeche.fr/article/2015/04/02/2079041-l-heure-du-verdict-a-sonne-pour-les-accuses.html
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