jeudi 20 février 2014

Albi. Harcelés au travail, ils se battent pour leurs droits

Patrick, 51 ans est cadre, Marie, 46 ans assistante dans une entreprise dans le secteur d’Albi. Tous les deux souffrent de harcèlement au travail. Ils ont choisi de témoigner et veulent aujourd’hui faire valoir leurs droits.
«On ne m’a jamais insulté ou dit que j’étais stupide, le harcèlement se fait de manière beaucoup plus subtile». Ces mots ce sont ceux de Patrick*, 51 ans et cadre dans une entreprise de l’agglomération albigeoise. Depuis 15 ans, il travaille dans la même société. Son travail est apprécié par ses collègues et sa hiérarchie jusqu’au jour où un nouveau chef arrive il y a deux ans. Très vite, il se sent dévalorisé. Les humiliations deviennent quotidiennes : «Dans les réunions, on ne me parle jamais directement, on fait comme si je n’existais pas. Mon chef me dit bonjour mais on communique presque uniquement par mail. Quand une réunion est annulée, on ne me prévient pas…» Des petits riens qui le mettent progressivement à l’écart. Et puis, s’ajoute la pression sur les résultats : «On me demande de finir tout seul en un mois un projet qui demande habituellement 6 mois en équipe !». Les excellents résultats de Patrick deviennent d’un coup mauvais. Sa hiérarchie lui enlève la responsabilité de plusieurs services, il n’a plus d’entretien annuel pour évaluer ses compétences et alors que ses collègues reçoivent des primes son évolution dans l’entreprise est brutalement stoppée. En huit mois, il perd pied. «J’ai longtemps lutté mais un soir, je suis rentré chez moi et j’ai appelé mon médecin.» Pendant six mois, il est en arrêt de travail. La déprime passée, il reprend son poste. Et décide de saisir l’inspection du travail.

21 % des salariés français seraient touchés

En France, le harcèlement moral est théoriquement passible de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Mais encore faut-il le prouver. C’est au salarié de montrer qu’il a subi des «agissements répétés qui portent atteinte à ses droits et sa dignité, altèrent sa santé physique ou mentale et compromettent son avenir professionnel». Selon la dernière étude des médecins du travail en 2010, 21 % des salariés seraient concernés mais pour un cabinet d’avocat spécialisé seules 10 % des entreprises seraient condamnées après une plainte pour harcèlement moral. Marie*, 46 ans et assistante dans une société dans le secteur d’Albi, n’a, elle, pas eu la force de porter plainte. Fin 2007, après 10 années passées dans l’entreprise, une nouvelle chef de service est nommée. Marie perd toute estime de soi: «Même pour un simple courrier, elle revoyait tout trois fois alors que je n’ai pas de problème d’orthographe ou de syntaxe». Marie perd tous ses moyens et un an plus tard elle est en arrêt maladie. «Le médecin m’a relevé une tension de 18 ! raconte l’employée. En deux ans, j’ai pris 40 kg. J’étais un peu contre les médicaments mais j’ai demandé des antidépresseurs J’étais en dessous de tout».
Cinq mois plus tard, elle reprend le travail à un autre poste. Aujourd’hui, elle est devenue déléguée syndicale et alerte régulièrement les instances sur des cas de harcèlement. De son côté, Patrick attend d’une semaine à l’autre la décision de l’inspection du travail du Tarn. Pendant plusieurs jours, cette dernière a mené une enquête dans l’entreprise. La société veut le pousser vers la sortie et lui propose à plusieurs reprises un départ négocié, le cadre refuse. Aujourd’hui, il fait l’objet d’une procédure de licenciement. Démissionner ? Patrick n’y pense pas. «J’ai 51 ans et des filles en études supérieures. Ce n’est pas un secret, il y a un fort chômage chez les plus de 50 ans».
*Prénoms d’emprunt

http://www.ladepeche.fr/article/2014/02/20/1822384-harceles-au-travail-ils-se-battent-pour-leurs-droits.html

Aucun commentaire: