vendredi 26 avril 2013

Lautrec. Elle raconte sa vie "d'esclave" chez un notable du Tarn

L'affaire dite «d'esclavagisme moderne» qui a secoué le landerneau lautrecois puisqu'elle vise l'un de ses notables, ne sera finalement jugée qu'en octobre après un énième renvoi. La victime présumée et son avocat nous parlent de sa vie. Du Zola…
Victime présumée de «traite d'être humain commise à l'égard de personne vulnérable», faits commis de 2007 à 2009, Jeanine Lecourieux, coule aujourd'hui des jours tranquilles au sein d'une famille amie de Lautrec. Placée sous curatelle renforcée en raison de sa grande vulnérabilité… dont justement un notable lautrecois est soupçonné d'avoir abusée. Nous l'avons rencontrée en présence de son avocat Me Hervé Rénier.

Un roman de Zola

«Aujourd'hui, je suis au paradis, nous confie Jeanine. Je vais très bien. On est très gentil avec moi… Mais, j'ai très envie que tout cela arrive au bout.»
Il faut dire que la vie de Jeanine Lecourieux ressemble à un véritable roman à la Zola.
Me Renier l'évoque : «Ma cliente a été placée en famille d'accueil à l'âge de 4 ans. Compte tenu de graves difficultés de compréhension, on a alors pensé qu'elle présentait un handicap de surdité. Elle a fréquenté l'Institut national des sourds-muets jusqu'à l'âge de 18 ans. En fait, elle affichait tout simplement un QI de 53. Elle a finalement été réorientée vers l'école qu'elle a fréquentée jusqu'à l'âge de 13 ans, avec le niveau d'une élève de 7 à 8 ans.»
Et l'avocat de préciser : «Aujourd'hui, elle ne sait toujours pas lire, pas écrire, pas compter.»
À 13 ans, Jeannine a été placée en foyer spécialisé. «J'ai une sœur… mais, je ne l'ai revue que tout récemment», signale l'infortunée. «Adulte, elle a rejoint un autre établissement à Machilly en Haute-Savoie, continue l'avocat. Et c'est là qu'elle fait la rencontre de la personne principalement poursuivie dans cette affaire.»

130 000 € captés

«Il était le directeur du foyer, signale Jeanine. Et j'ai travaillé dans le foyer…» «Effectivement, elle a eu un contrat de travail, comme femme de ménage, à compter de 1972, précise Me Rénier. Lorsque le directeur quitte l'établissement en 1990, il propose à ma cliente de le suivre, en lui promettant un emploi et une vie dorée à Castres. En fait, elle y sera boniche gratuite, tout en payant un loyer représentant la moitié de sa maigre pension !»
Et l'avocat d'affirmer : «Elle va percevoir une somme importante - près de 130 000 € - fruit de la vente d'un terrain lui appartenant. Et il est présumé donc que son «hébergeur» s'accaparera cette somme pour effectuer d'importants travaux dans une maison castraise, qu'il revend ensuite avec une forte plus-value pour aller s'installer à Lautrec… où Jeanine suit. Cette captation ne représente qu'une partie de ce dossier. L'autre partie, la plus particulière, étant bien entendu que Mme Lecourieux a travaillé gratuitement pour son compte, dans des conditions indignes, à Castres puis dans les chambres d'hôtes créées à Lautrec. Lorsqu'elle a été trop diminuée physiquement, on lui a demandé de partir…»
«Ce n'est pas normal», lâche dans un regard songeur Jeanine.

http://www.ladepeche.fr/article/2013/04/26/1614342-lautrec-esclavagisme-la-vie-de-zola-de-la-victime.html

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