samedi 23 mars 2013

Immolation d'un cadre France Télécom à Pau : des doutes sur les enquêteurs maison

Deux semaines après le suicide d’un cadre palois âgé de 41 ans, qui s’est immolé par le feu, chez lui, quelques jours après une mise à pied qu’il vivait très mal, le PDG de France Telecom-Orange, Stéphane Richard, a saisi le médiateur national de l’entreprise, Jean-François Colin. Sa mission : examiner l’enquête interne qui visait le salarié et avait conduit à sa suspension temporaire.
« Le drame survenu à Pau a suscité des questionnements sur la nature de l’intervention du Pôle d’enquêtes Ouest-Sud-Ouest. Dans de telles circonstances, l’entreprise s’attache à apprécier l’existence d’un lien éventuel avec son fonctionnement. C’est dans ce cadre que je vous demande d’analyser l’intervention de ce pôle d’enquêtes et du contexte dans lequel elle s’est inscrite, en vous fondant sur un examen de l’application de ses procédures et méthodes, en vous attachant au déroulement concret de l’enquête, notamment au regard des relations avec les personnes soupçonnées ou incriminées », écrit Stéphane Richard dans un courrier daté du 18 mars que « Sud Ouest » a consulté.

Seul face à ses accusateurs
Le médiateur lui rendra ses conclusions dans un délai de deux mois. Elles seront ensuite communiquées au comité national d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CNHSCT) de l’entreprise.
Une démarche qui n’est sans doute pas étrangère aux sollicitations d’organisations syndicales, notamment de Sud qui, dans une lettre adressée dès le 6 mars au PDG d’Orange, s’interrogeait sur « les méthodes d’investigation » des boeufs-carottes de France Telecom et lui demandait d’ouvrir une enquête.
Derrière ces doutes, une question essentielle que beaucoup se posent : la sanction disciplinaire dont le cadre faisait l’objet était-elle ou non disproportionnée ?
Fonctionnaire, le quadragénaire travaillait depuis près de vingt ans à France Telecom. Il était responsable logistique sur le site de l’avenue de Buros, à Pau. Apprécié de ses collègues, il était très bien noté par sa hiérarchie. Jusqu’à ce qu’une enquête interne soit ouverte contre lui, récemment. Le cadre était soupçonné d’avoir détourné du matériel payé avec des fonds de l’entreprise (des bobines de fil, par exemple), pour des travaux chez lui. Six jours avant sa mort, des enquêteurs maison sont descendus à Pau. L’homme a été auditionné sur son lieu de travail et aurait minimisé, voire contesté, les accusations. Il a été mis à pied le soir même. Pendant son interrogatoire, il n’a été assisté d’aucun représentant du personnel, comme le permet pourtant le règlement de la société. « Nous n’avons appris ce qui se passait qu’après son entretien », indique Pierre Bordes, secrétaire régional CFDT S3C, syndicat dont le défunt était adhérent. « Comment s’est passée cette audition ? Avait-il été convoqué ? Selon des collègues, il en est ressorti livide. Or, cela fait des années qu’on dénonce le déroulement de ces enquêtes internes qui laissent les personnes déboussolées et cassées », enchaîne Camille Junqua, de la CGT-FAPT.
Réunion du CHSCT ce matin
À Sud aussi, les pôles d’enquêtes internes interpellent. « Depuis quatre cinq ans, ils sont souvent mis en cause sur leurs méthodes. Des salariés parlent d’interrogatoires musclés, de pressions », explique Patrick Ackermann, délégué syndical central adjoint. Une charte déontologique existe toutefois. A-t-elle été respectée à Pau ? C’est ce dont veut s’assurer le PDG de France Telecom mais également le CHSCT local, qui se réunit à nouveau ce matin, sur ce sujet, à Dax. Représentants de la direction et élus du personnel doivent désigner un comité chargé de faire la lumière sur ce drame. De son côté, la justice poursuit ses investigations, dans le cadre d’une enquête préliminaire du parquet, confiée aux gendarmes de la brigade de recherches de Lescar

http://www.sudouest.fr/2013/03/22/des-questions-sur-les-enqueteurs-maison-1002076-3350.php

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