Pas facile d’obtenir des confidences et encore moins des aveux des accusés. La loi du silence parasite le procès des agresseurs présumés du père Jean-Claude Guéguen. Pascal Houssart, 47 ans, et Bernard Lombard, 50 ans, comparaissaient hier et jusqu’à demain devant la cour d’assises de l’Oise pour des coups mortels, assénés le 9 juillet 1997, à Pont-Sainte-Maxence. Le curé de la paroisse avait été retrouvé gisant sur son lit, le corps et le visage couverts d’hématomes. Le légiste avait conclu à une asphyxie par suffocation.
Les prévenus, issus de la communauté des gens du voyage, préfèrent les réponses courtes et évasives où l’on ne saisit que quelques mots dans des phrases quasi inaudibles. Pascal, le visage buriné d’un vieux Gitan, se raconte quand même un peu : « Ma passion, c’est la musique. Je joue de l’accordéon. Quand je suis ivre, je prends mon accordéon et je pleure. » Ce sera la seule concession sur son intimité. L’image est pourtant bien loin des dépositions de Marie, son ex-compagne. « Dans sa folie, il était capable de tuer. Il ne faisait jamais le guet, en revanche il montait au casse. » Mais devant la cour d’assises, elle a subitement perdu sa langue et s’abrite derrière un folklore gitan bien pratique : « Chez nous, on n’a pas le droit de demander aux maris ce qu’ils font. C’est une tradition. »
Dans le box, Bernard Lombard est encore plus indéchiffrable avec son regard fixe. Son casier parle pour lui. Il purge une peine de trente ans de prison pour vol avec violences et séquestration en récidive, dans une affaire plus connue sous le nom des « hôteliers de Dax ». Des individus avaient tabassé trois personnes en menaçant de leur percer les yeux avec une paire de ciseaux. Il totalise dix-sept condamnations depuis l’âge de 14 ans. Il est entré en détention il y a quatorze ans, en octobre 1997, trois mois après le crime de Pont-Sainte-Maxence, il n’en ressortira qu’en 2023 au plus tôt. Mécaniquement, il répète : « C’est des faits que j’ai rien à voir. » Dans le cabinet du juge d’instruction, il menace de renverser son bureau. « Il m’avait fait faire 300 km pour rien », lâche-t-il.
Il n’est pas du genre à se laisser aller à la confidence. Le président Damulot tente alors de l’amadouer : « Vous avez été transféré vingt-trois fois en détention. Cela ne vous a pas pesé? » Réponse laconique de Bernard : « Pas du tout. » Il reste insondable. En prison, il a refusé les enquêtes de personnalité et les expertises psychiatriques. Il ne veut pas travailler non plus. Quand il est à l’extérieur, il est ferrailleur, vend des matelas et vole : « C’est la vie et la misère qu’on a connue », dit-il en guise d’explication.
A ses côtés, Pascal Houssard reste impassible. Ailleurs. Comme si cette histoire ne le concernait pas. Dans la vie, ils sont cousins, mais ils persistent à dire qu’ils ne se fréquentent pas. Jamais ils n’ont séjourné au camping de Pont-Sainte-Maxence, jamais ils n’ont escaladé le mur du presbytère, jamais ils n’ont roué le curé de coups jusqu’à le tuer.http://www.leparisien.fr/pont-sainte-maxence-60700/le-silence-des-meurtriers-presumes-du-cure-09-02-2012-1852757.php
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire