L’appel à la manifestation leur a parlé immédiatement. Comme un souffle qui manquait à un feu couvant. Ils portent depuis des jours le gilet jaune, ou l’ont posé fièrement sur le tableau de bord de leur véhicule. Christian, Laurie, Stéphanie, Gilbert y seront, le 17 novembre. Comme des dizaines de milliers de Lorrains qui annoncent sur les réseaux sociaux leur intention de participer à un mouvement citoyen qui pourrait paralyser le pays.
Le prix de l’essence n’est que la partie visible d’un malaise « plus profond », disent les gilets jaunes rencontrés sur la route. Un prétexte pour dire ce qu’ils ont sur le cœur. « Je vais exprimer un ras-le-bol de tout », annonce Christian. « J’ai le sentiment que les politiques se fichent de nous. Ça devient insupportable. Il faut leur faire savoir. » Pas manifestant dans l’âme, le retraité meurthe-et-mosellan se rendra à Metz, sans doute à moto. Il roulera avec sa situation personnelle dans la musette. Celle d’un homme qui a travaillé toute sa vie et qui « vit à crédit à partir du 20 du mois. Ce n’est pas normal. Cette année, nous avons pris, avec ma femme, 500 litres de fioul que l’on paie en deux fois. On aurait bien pris 1 000 litres… »
Sur la même tonalité, celle de l’exaspération, Sophie, qui manifestera à Verdun samedi, soupire : « Comme beaucoup, je suis écœurée. J’en ai ras le bol de travailler pour rien. » Partout en Lorraine, des femmes et des hommes ne se connaissant pas se sont retrouvés autour de la même amertume pour préparer le 17 novembre.
Une trentaine de gilets jaunes se sont ainsi retrouvés au plan d’eau de Remiremont pour mettre au point le blocage de la ville. « J’ai 54 ans. C’est la première fois de ma vie que je vais manifester », assure une participante.
Stéphanie a coché la date du 17 novembre. Elle se rendra sur un lieu de rassemblement à Saint-Avold. « Je suis favorable au mouvement, à l’idée de pousser un coup de gueule, parce qu’on n’en peut plus. Je me suis quand même interrogée sur l’opportunité d’un blocage général », dit cette jeune maman de 24 ans. « Ça va embêter tout le monde. Mais je ne vois pas d’autres solutions. C’est navrant, mais que faire d’autre ? »
Meneuse d’un groupe qui s’était déjà montré actif dans la fronde contre le passage aux 80 km/h, Laurie ira sur une zone commerciale : « Nous sommes apolitiques, ce qui nous importe, c’est le peuple. On sera présent en nombre, je pense. 12 000 personnes sont inscrites sur la page Facebook. À 500, on pourra tout bloquer. » Sans aucun risque de débordement, pense-t-elle. « Dans notre groupe, il y a des infirmiers, des ambulanciers, des pompiers, des gens capables de faire la sécurité aussi. Tout sera fait pour que ça se passe bien. » Lors des distributions de tracts, elle a pu mesurer que le mouvement ne faisait pas l’unanimité. Elle avoue son incompréhension : « Des personnes se moquent de payer plus de taxes. Je ne comprends pas du tout… Ils ne doivent pas connaître de gens qui vivent avec 1 100 € par mois. »
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