vendredi 1 avril 2016

Nancy : les millions s’évaporent sur le Net

Retraité d’une société internationale cotée en bourse, cet habitant de la banlieue nancéienne pensait avoir trouvé le bon filon pour doper son capital en un temps record. Pas en laissant dormir ses fonds à 0,75 % sur un livret A mais en investissant à un taux mirifique sur le marché des changes, le Forex (de l’anglais Foreign Exchange). Un marché interbancaire où s’échangent 24 h/24 h, les devises internationales. Un trading mondial sur lequel règne en maître le broker (courtier) mais qui s’est ouvert aux particuliers avec l’essor d’internet, via des sociétés de trading en ligne.
Si certaines entreprises sont reconnues par l’Autorité des marchés financiers (AMF), le régulateur de la place financière tient à jour une liste noire - consultable en ligne - de plusieurs centaines de sites suspects ou non autorisés à fournir des services d’investissements en France. Appâté par les promesses de gains et les fenêtres publicitaires (pop-up) en pleine floraison sur l’écran de son ordinateur, le retraité à la fibre boursicoteuse se laisse aller à remplir un formulaire de renseignements pour jouer l’apprenti trader. Peu après son inscription expédiée dans les méandres du Net, un interlocuteur de la société en question le contacte. L’homme se présente dans un français parfait sous une identité qui sonne « vieille France ». Un premier contact téléphonique rassurant.
Beaucoup d’autres appels suivront. Mis en confiance, conditionné par un discours bien rodé et une courbe de progression/performance de son portefeuille accessible en live, l’investisseur se laisse convaincre d’injecter quelques centaines d’euros, histoire de se faire la main. Le retour sur investissement est au rendez-vous. Le piège est en train de se refermer sur la souris dorée du retraité qui, à coups de clics, va engager un total de près de 3 millions d’euros. Avant que ses proches ne découvrent tardivement le pot aux roses en naviguant sur la fameuse liste noire de l’AMF.

Comptes bancaires rebonds

La somme - colossale - évaporée à partir du faux site de trading vers des comptes bancaires rebonds souvent domiciliés de manière éphémère en Pologne, Slovénie, République Tchèque, Royaume-Uni, Israël ou encore Hong Kong, ne sera très probablement jamais récupérée. Un mode opératoire similaire dont aurait déjà été victime une dizaine de particuliers en Lorraine mais avec un préjudice moindre. Et dès lors que le trader en herbe souhaite percevoir la valorisation de son capital, on lui réclame des frais, on l’oriente vers une (fausse) société de recouvrement…
Un nouvel écran de fumée ou le 2e essorage financier d’une victime raccrochée à l’espoir de se refaire, comme au casino. Et dès lors que la poire ne produit plus la moindre goutte de jus, elle n’a plus d’accès au site qui souvent, change de nom ; les contacts téléphoniques cessent et les numéros d’appels sonnent aux abonnés absents. Bref, le black-out total en un claquement de doigt autour d’une victime happée par une machine criminelle qui excelle dans l’art d’aspirer les millions d’euros. Sans même une rencontre physique préalable avec un investisseur. Ou l’art de surfer sur l’évolution de notre société et notre façon, exponentielle, de consommer du Net. Sans modération. Les yeux fermés.
http://www.estrepublicain.fr/edition-de-nancy-ville/2016/04/01/escoquerie-a-nancy-les-millions-s-evaporent-sur-le-net

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