«On était fatigué. On venait de s'asseoir. Et on les a entendus arriver… ça fait plaisir.» Vingt heures qu'Alfred et Lucas de Peppo étaient dans la grotte de Sakany, sur les hauteurs de Tarascon. Près de 10 heures de recherche pour les secours. Dans la nuit de mardi à mercredi, vers 2 heures, les deux frères, âgés de 27 et 17 ans, accompagnés d'un copain, décident de partir pour une sortie spéléo. Arrivés devant une des quatorze entrées de la cavité, l'ami quitte la partie. Les deux frères, équipés de baudriers, d'une corde et de mousquetons, pénètrent sous terre. «Je suis déjà venu ici, confie Alfred. Mais rapidement, on s'est trompé de chemin.» Perdus, à errer dans les 6 kilomètres de galeries. Il fait 13 °C. À l'extérieur, un ami inquiet de ne pas les voir ressortir donne l'alerte. «Toujours quand je pars, je donne une heure approximative de retour.», détaille Alfred, choqué, un œil attentif sur son frère.
Dès la fin de matinée, les pompiers ont installé un poste de commandement, à Quié. Et contactent le secours spéléologie français. Huit spéléologues bénévoles, tous confirmés, s'équipent et partent explorer les différentes galeries par équipe. Devant la salle polyvalente du petit village, plus les heures passent, plus les visages se crispent. «Ce sont des spéléogues occasionnels, nous n'avons pas les mêmes réflexes. Et la cavité labyrinthique complique les opérations, explique Florence Guillot, conseillère technique départementale du spéléo-secours français. Sous terre, le temps s'étire différemment. Et les deux jeunes se déplacent en même temps que nous.»
C'est seulement à leur troisième passage dans une galerie qu'une équipe de spéléologues tombe sur les deux hommes. Épuisés. Mais sains et saufs. Il est 20 h 15. Ils se restaurent, s'hydratent, et commencent enfin à marcher vers l'extérieur.
Dehors, tout a été préparé en vue de cette sortie. Dans l'après-midi, les pompiers spécialisés secours montagne ont balisé le terrain escarpé. Des projecteurs ont été installés le long du parcours pour faciliter la circulation des sauveteurs. Les parois, elles, ont été équipées par les spéléologues. À Quié, une vingtaine d'hommes des centres de Tarascon, Foix, Pamiers et Varilhes, placés sous les ordres du commandant Christian Lukowicz, préparent l'accueil des rescapés. Tout l'après-midi, ils ont passé à la loupe les cartes topo, et espéré un dénouement heureux. Les gendarmes de Tarascon veillent. En fin d'après-midi, Anne Peny, secrétaire générale de la préfecture de l'Ariège, s'est rendue sur place pour se tenir informer de l'avancement des opérations. Devant la salle polyvalente, les amis des deux hommes commencent à se rassembler. Les deux frères sont connus par ici ; ils viennent d'ouvrir une pizzeria à Tarascon. Dans le camion qui les ramène vers le poste de commandement, Lucas s'interroge : «Il est quelle heure là ? On va aller travailler non ?» Arrivés à Quié, ils sont examinés par un médecin. Ils vont bien. Demain, ils reprendront le chemin de leur pizzeria. À l'ombre de la grotte de Sakany.
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