mercredi 16 octobre 2013

Pau : une auto-école ferme subitement, des élèves privés de permis malgré les 1 000 euros versés

«Pas de cours de code cette semaine » : telle est l’unique explication, affichée sur un bout de papier scotché à la vitrine, qui est fournie aux clients de l’auto-école Sud Contact, rue Castetnau à Pau, lorsque ceux-ci butent sur la porte désespérément close depuis fin août. À l’intérieur, une poubelle déborde de papiers, un bureau et quelques chaises sont encore là, mais le matériel informatique a disparu. Devant l’entrée, un tas de recommandés, des courriers d’un mandataire judiciaire et d’Infogreffe gisent sur le sol. La ligne téléphonique a été coupée, et « quand on tente d’appeler sur le portable du gérant, qui travaillait seul ici, ça ne répond jamais », raconte Sandra Delahaye.
Cette Paloise de 20 ans ne décolère pas. En février dernier, elle s’est inscrite dans cette auto-école située à deux pas de chez elle et aux prix très alléchants. « J’ai payé 1 020 euros en une fois pour une formule code et permis avec 30 heures de conduite. C’était près de 500 euros de moins que partout ailleurs », confie la jeune femme. En recherche d’emploi, elle avait réussi à réunir la somme à force d’économies, dans le but de s’offrir le précieux sésame indispensable pour exercer comme assistante de vie, sa formation.

Mais ce qu’elle avait pris pour une aubaine ne tarde pas à mal tourner. « D’abord, lorsque j’ai demandé à passer le code après avoir enchaîné les heures de cours, je me suis heurtée à un mur. À chaque fois, le gérant me renvoyait à plus tard. Et quand, en avril, je lui ai demandé de commencer les cours de conduite, il m’a répondu : ‘‘On verra ça en septembre’’», affirme l’élève. À cause de problèmes de santé, elle ne se présente pas à l’auto-école pendant plusieurs mois. Et découvre, médusée, la soudaine fermeture de l’établissement, voilà quelques jours.
Estimant avoir été victime d’une arnaque, elle contacte le commissariat de Pau, vendredi dernier, pour porter plainte. « Il m’a été répondu que je n’étais pas la première à appeler mais que ce n’était pas de leur ressort, car il s’agissait d’un litige commercial : je devais aller au tribunal d’instance pour retirer un dossier de mise en demeure. » Chose faite mardi. « Mon recommandé va rejoindre le tas qui attend derrière la vitrine », se désole la demoiselle qui n’a qu’un seul souhait : récupérer son argent.
Ce qu’espèrent également plusieurs personnes qui ont laissé leur numéro de téléphone au restaurant voisin de l’ancienne auto-école. « J’en ai vu défiler pas mal depuis septembre, très énervés, témoigne le patron du Pacha Kebab, Ali Ozyurt. Toutes me demandent de donner leur contact au gérant si je le croise. Mais je ne l’ai pas vu depuis plus d’un mois. »
Parmi ces visiteurs, un autre Palois, père d’un élève, qui a lui aussi voulu porter plainte. « Nous avions inscrit mon fils pour la conduite accompagnée. On a tout payé en une seule fois, car nous avions droit à un prêt de l’État à 1 euro. Or, il n’a jamais pu passer le code et s’est ensuite découragé. Jusqu’en juillet, le gérant m’a dit qu’il allait nous rembourser. Et puis, plus rien. Il a disparu dans la nature », confie ce monsieur qui a déjà été sollicité par quatre autres personnes se disant lésées. Il évalue à « une trentaine les personnes concernées ».
S’il ne répond pas à ses clients, le gérant de Sud Contact rappelle la presse mais botte en touche. « L’entreprise est en liquidation judiciaire depuis fin août. J’ai remis tous les dossiers au service compétent de la Direction départementale des territoires et de la mer [NDLR : administration rattachée à la préfecture qui gère les permis de conduire]. Les gens peuvent les récupérer là-bas. Moi, je ne gère plus rien, un mandataire judiciaire a été désigné », lâche-t-il avant de s’énerver quand on lui demande pourquoi il fait le mort auprès de ses clients. « Il n’y a jamais eu d’arnaque ! Et puis, je n’ai rien à vous expliquer ! »
Plusieurs de ses élèves se sont rendus à la DDTM. « Certes, on peut y récupérer notre dossier pour s’inscrire dans une autre auto-école. Mais il faut alors repayer », dénonce Sandra Delahaye. Avec ses maigres revenus, elle n’a plus les 1 500 euros nécessaires.
Au courant de la situation, Gérard Boulanger, président de l’Union nationale des indépendants de la conduite dans les Pyrénées-Atlantiques, confirme les difficultés de son confrère. « Il a eu pas mal de soucis, y compris personnels. Le connaissant, je ne pense pas du tout qu’il y ait la moindre intention maligne de sa part. Mais c’est vrai que laisser les élèves comme ça, à la rue, ce n’est pas génial. Et cela risque d’être très délicat pour les personnes à qui il doit de l’argent. »
Sur la trentaine d’auto-écoles de l’agglomération paloise, Sud Contact est la deuxième à fermer soudainement cette année. Comment faire pour se prémunir d’une telle déconfiture ? « Déjà, mieux vaut ne pas tout payer d’un coup, mais verser ce que l’on doit au fur et à mesure de l’avancée de la formation », conseille Gérard Boulanger.

http://www.sudouest.fr/2013/10/16/prives-de-permis-1200419-4344.php

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