L’astuce se transmettait dans la famille comme une bonne recette de cuisine. Simple. Et efficace pour arrondir les fins de mois. Elle a valu à ses adeptes de comparaître jeudi devant le tribunal correctionnel de Bordeaux pour escroquerie. Nombre de victimes : 138 en un an, sur toute la France, mais principalement en Aquitaine.
La méthode consistait à repérer sur le bottin des numéros de téléphone de personnes aux prénoms pouvant correspondre à une personne âgée. Puis de les contacter en se faisant passer pour la banque, en prétextant un bug informatique ou une fraude sur leur carte bancaire. Un prétexte qui suffisait à convaincre les personnes au bout du fil qu’il fallait changer de carte bancaire et remettre l’ancienne à un coursier dans une enveloppe évidemment fermée. Mais si la personne souhaitait conserver son code sur sa nouvelle carte, elle était invitée à le donner sans plus attendre à la fausse opératrice.
Quelques minutes plus tard, une femme se présentant également comme employée de la banque se rendait au domicile de la victime et récupérait la précieuse carte bancaire. Direction : le distributeur le plus proche, puis les magasins alentour !
Marie, 107 000 euros
Marie, la cinquantaine, mère de famille, a ajouté beaucoup de beurre dans les épinards grâce à cette technique. À elle seule, elle a détourné 107 000 euros en quelques mois. « C’est un engrenage, elle a malheureusement rencontré des gens, dont elle veut taire le nom, qui lui ont montré comment se faire de l’argent rapidement », pense son avocate, Me Cazals.
Marie avait aussi un peu affiné la technique de base. Ainsi, suivre discrètement les personnes lorsqu’elles faisaient leurs courses lui permettait de repérer le nom de leur banque, et même de lister leurs derniers achats, avant de repérer leur adresse. De quoi rendre le contact téléphonique plus efficace. D’autant que beaucoup étaient en état de grande vulnérabilité. « Vous savez pourquoi vos victimes ne sont pas là ? » questionne la présidente Caroline Baret. Avant de trancher : « Elles sont mortes. »
Madeleine, elle, utilisait une mallette en Skaï noir, pour faire « plus vrai », chez les gens. Mais : « Pour aller sur place, je buvais », raconte-t-elle. « Ça devait faire bien : une employée de banque imbibée d’alcool », soupire la juge.
De 6 mois à 2 ans de prison
En 2007, les gendarmes ont brutalement mis fin au manège. À force de recoupements, et de recours aux techniques de police scientifique, ils ont identifié et interpellé une douzaine de personnes, toutes issues de la communauté des gens du voyage. Lors des perquisitions, les militaires ont trouvé de l’argent, des bijoux, de l’électroménager, des vêtements issus, selon eux, de ces achats frauduleux.
« Une entreprise industrielle d’escroquerie », estime le procureur Gérard Aldiger, avant de requérir des peines allant jusqu’à quatre ans de prison.
Le tribunal se contentera de deux ans pour Marie, la principale prévenue, et de six à dix-huit mois pour six autres prévenus, dont certains avaient déjà effectué de longues périodes de détention provisoire.
http://www.sudouest.fr/2013/09/07/les-escrocs-se-faisaient-passer-pour-la-banque-1161711-2780.php
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