À Marseille, ce ne sont pas les bars qui manquent. Pas moins de 1 338 ! Et c'est dans le même, le 4 avril 2006, que s'étaient croisés deux chefs de clan rivaux. Le Salonais, Farid Berrhama, et le Corse, Ange-Toussaint Federici, dit Santu. À deux pas de la passerelle de Plombières, à Saint-Just, un quartier qui ouvre la porte sur le Nord de la ville, le bar des Marronniers n'est pourtant pas vraiment le dernier endroit à la mode... C'est notamment ce curieux hasard que l'accusé va devoir expliquer à la cour d'assises de Draguignan qui le juge en appel à partir de ce matin.
"Après avoir fait les boutiques, rue Paradis, j'étais venu boire un "Vittel" en attendant un ami", s'était-il inlassablement justifié, en novembre 2010, lors de son premier procès à Aix. Et comme Santu est un homme malchanceux, non seulement il avait choisi le mauvais bar, mais, pile au moment où il sirotait son eau minérale, vers 21 h 30, un commando armé avait déboulé dans le bar et criblé de balles Farid Berrhama et ses deux lieutenants, Radouane Baha et Heddie Djendelli. Décidément, comme ce n'était pas son jour de chance, Federici avait eu la jambe perforée par une balle qui avait ricoché. Une blessure qui a laissé des traces... Notamment son ADN ! Discret, le Corse avait été opéré sous un faux nom à la clinique Clairval. Le temps que la brigade criminelle de la police judiciaire fasse le rapprochement, il était interpellé à Paris quelques mois plus tard.
L'alibi du "Vittel" avait tenu la cour en haleine pendant plus d'une semaine. Buté, Fédérici ne voulait pas lâcher le nom de "l'ami" qu'il devait retrouver ce jour-là. "Vous savez, les faits sont graves, s'était presque offusqué l'accusé face aux questions pressantes du président Deschamps. Il y a eu trois morts ! Cette personne ne veut certainement pas être mêlée à tout ça. Maintenant, si elle veut venir, elle vient". Et elle n'était pas venue. Ni tout au long des débats. Ni lors du verdict qui avait condamné Santu à 28 ans de réclusion criminelle, dont 18 ans de mesure de sûreté pour ce triple assassinat commis en bande organisée.
"C'est une condamnation au bénéfice du doute qui ne prend pas en compte le vide de ce dossier", avait tonné la défense du berger corse, en promettant un appel dans la foulée. Ce qui avait été fait. En même temps, ou presque, que la production d'un nouveau témoignage : celui de "l'ami" providentiel. Un peu distrait, l'homme s'était souvenu, un peu tard, qu'il avait effectivement rendez-vous avec Fédérici le jour de la tuerie. Le procès en appel, qui avait, dans un premier temps, était fixé du 16 au 20 avril, avait donc été renvoyé le temps d'un supplément d'informations.
"Ce témoin confirme qu'il devait voir Ange-Toussaint Federici aux Marronniers, indique Me Matteï, un des avocats de l'accusé. Ils se connaissent. Mais, étant donné l'ancienneté des faits, tout ce qu'il avance n'a pas pu être prouvé..." L'acquittement à partir de ce témoignage n'est donc pas gagné. D'autant que pour l'accusation, le mobile vient conforter les éléments matériels chargeant Santu. Farid Berrhama, surnommé "Fafa" (voir ci-dessous) avait déclaré la guerre aux Corses en décidant de remettre la main sur ses machines à sous installées autour de l'étang de Berre. Quinze jours avant la tuerie des Marronniers, Roch Colombani, un petit voyou aux solides attaches insulaires, avait été criblé de balles dans sa voiture, près de Marignane... Les Corses se devaient de stopper l'ambition de Berrhama.
"Pour nous, avait résumé un enquêteur, ça ne fait aucun doute. Le cheminement est fait". Si la mort de Berrhama avait été programmée, l'assassinat de Colombani l'a certainement précipitée.
http://www.laprovence.com/article/actualites/proces-en-appel-pour-la-tuerie-du-bar-des-marronniers-de-marseille
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