Une incroyable coïncidence lie les tueurs de Jackie Baudry à Saint-Quentin et une équipe de cambrioleurs croates qui a frappé à Dizy dans la Marne. Les deux gangs ont utilisé une Jaguar identique à quatre jours d'intervalle.
L'élimination de Jackie Baudry dans la pure tradition des méthodes empruntées au grand banditisme trouble les policiers de la PJ de Lille. Rien dans la vie de ce petit bout de femme de 64 ans au grand cœur ne présageait qu'elle rendrait son dernier souffle au milieu des balles qui sifflent. Éliminée d'une rafale de fusil semi-automatique de type Kalachnikov à la manière des truands qui se tirent des balles entre les deux yeux pour la conquête du milieu.
Un modèle X bleu métallisé
À Saint-Quentin, les tueurs profitent d'un arrêt devant la pizzeria Speed Rabbit, le long du boulevard Saint-Martin. Jackie attend en double file le retour de son amie Rose, partie récupérer la commande. Une aubaine pour les deux encagoulés en Jaguar qui observent la scène. Ils profitent de cette courte fenêtre de tir pour opérer une frappe chirurgicale. Le conducteur se porte au niveau de la Renault Scénic de Jackie tandis que son passager ouvre le feu sans l'ombre d'une hésitation. Une poignée de seconde plus tard, le tir nourri a atteint sa cible à six reprises.
Le commando anonyme dégage sur les chapeaux de roue. Quelques heures plus tard, ce dimanche 23 septembre, la Jaguar achève sa course folle à Noyon. Les tueurs brûlent la belle anglaise pour être certain que les policiers ne la fassent pas parler. En l'absence d'indices et de mobile sérieux, l'enquête s'annonce « de longue haleine », comme l'a répété le procureur de Laon avant de passer la main à un juge d'instruction du pôle criminel. « Un vrai travail de professionnels », jugent magistrats et enquêteurs. À un bémol près.
Personne ne s'explique pourquoi l'expédition punitive est conduite au moyen d'une rutilante Jaguar modèle X bleue métallisée, dérobée au terme d'un audacieux home-jacking à Laon. D'abord parce que ce type de véhicule est par essence parfaitement repérable, ensuite parce qu'il a été dérobé pas moins de sept jours avant le crime et enfin parce que les voleurs n'ont pas pris l'élémentaire précaution d'en maquiller les plaques. Il suffit d'ailleurs de se référer aux affaires qui garnissent les colonnes des faits divers pour s'apercevoir que la Jaguar n'est pas un luxe qui s'offre les malfaiteurs pour exécuter leurs mauvais coups.
« Association de malfaiteurs »
C'est donc une incroyable coïncidence si une autre Jaguar X bleue métallisée a fait parler d'elle dans la Marne à quatre jours d'intervalle. Le 27 septembre, deux ressortissants des Pays de l'Est sont appréhendés en plein cambriolage dans une maison de Dizy. Tino Marinkovic est un Croate de 22 ans, déjà fiché par ses empreintes digitales sous un faux nom. Son complice de 17 ans reste une énigme aux yeux de la loi. Car le jeune homme dispose de plusieurs identités bidons. Les investigations font apparaître que les deux comparses sont liés à un certain Gordana Jovanovic. Ce dernier appartient à un gang de Croates qui écume la France en multipliant les cambriolages à la recherche d'argent frais et de bijoux. Il est d'ailleurs sous le coup d'une enquête pour « association de malfaiteurs, vols et recel en bande organisée ».
Quand les gendarmes se présentent aux abords de la maison de Dizy en milieu d'après-midi, un individu prend la fuite à bord d'une Jaguar bleue métallisée de type X, selon un témoin digne de foi.
La signature du tournevis
Celui-ci indique que l'anglaise porte des plaques belges facilement reconnaissables par leur couleur rouge. Il ne s'agit pas du véhicule utilisé pour éliminer Jackie puisqu'il avait été retrouvé incendié quatre jours avant. Mais s'agit-il d'un simple concours de circonstances ?
Le mystère mérite d'être percé d'autant que le home-jacking dont a été victime le propriétaire de la Jaguar à Laon présente d'étranges similitudes avec le cambriolage de Dizy. Dans les deux cas, les voleurs ont fait main basse sur du numéraire et des bijoux. Surtout, ils se sont servis d'un tournevis pour fracturer une des issues. « Ils ont forcé un volet et la porte-fenêtre avec un gros tournevis », témoigne Jean-Pierre à Dizy. « Ils ont tordu le pêne de la serrure de la porte du sous-sol avec un tournevis qui a laissé des traces caractéristiques sur le bois », lui fait écho le Laonnois, propriétaire de la Jaguar qui a servi au crime de Saint-Quentin.
Tout ceci est d'autant plus troublant que le gang des Croates est une organisation criminelle tentaculaire. « Une organisation criminelle structurée » qui fait venir de Zagreb des « exécutants » comme Tino Marinkovic depuis 2004, a indiqué le procureur de Reims au procès du jeune Croate qui a écopé d'un an de prison ferme. Voilà de quoi piquer la curiosité des enquêteurs de la PJ de Lille dont l'enquête marque le pas.
http://www.lunion.presse.fr/article/aisne/le-mystere-des-gangs-a-la-jaguar-bleue
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire