MM. Giolitto et Esso ont été, hier, condamnés à un an de prison avec sursis. En neuf ans, ils avaient tour à tour opéré quatorze fois une patiente. Au point de la rendre incontinente.
Pour le délibéré, Jean-Pierre Giolitto et Célestin Esso ne s'étaient pas déplacés, hier après-midi, au tribunal correctionnel de Charleville-Mézières. Hélène Braz non plus. Ce trio s'était expliqué à la barre le 19 octobre, lors d'une audience rendue éprouvante par l'enfer quotidien décrit par cette dernière. « Ce que je veux, c'est que plus jamais une femme n'ait à connaître ça », s'était indignée celle qui, devenue incontinente sévère à l'issue d'un improbable marathon chirurgical, doit dépenser chaque mois 1 500 euros de couches spéciales.
Entre 1994 et 2003, cette Sedanaise âgée de 63 ans, qui souffrait à l'origine de douleurs à la vésicule bilière, a été opérée… quatorze fois. Par Célestin Esso, sept fois. Puis par Jean-Pierre Giolitto, sept fois également. Droit dans leurs bottes face au tribunal, les chirurgiens urologues n'avaient énoncé ni regrets ni mea culpa face à celle qui leur avait « fait confiance ».
Fautes et imprudences
Hier, le tribunal a suivi de très près les réquisitions du ministère public : déclarés coupables de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois, les praticiens ont été condamnés à un an de prison avec sursis, 15 000 euros d'amende chacun et, à titre de peine complémentaire, l'interdiction d'exercer la profession de chirurgien pendant dix mois - deux ans avaient été requis. En outre, MM. Esso et Giolitto devront s'unir pour verser 40 000 euros de dommages et intérêts à leur ancienne patiente.
Explicitant le jugement, les vingt-cinq pages du délibéré développent les multiples fautes et imprudences accumulées par les deux chirurgiens : des « interventions précipitées » dont certaines réalisées sur un « terrain infectieux », des diagnostics qui n'ont jamais été « confortés par aucun des éléments complémentaires disponibles » et, pour ne rien gâcher, absence d'un suivi post-opératoire adéquat, « nouveau comportement fautif par négligence ».
Le 19 octobre, le chirurgien urologue Alain Haertig, appelé à la barre en qualité de témoin, avait commenté : « Je n'ai jamais vu une telle succession d'interventions […] C'est de la folie ! A la lecture de ce dossier, les bras m'en tombent. » Des mots d'une virulence rare dans la bouche d'un expert du tribunal. De quoi mesurer les aberrations accumulées pendant près d'une décennie par MM. Esso puis Giolitto. Et le traumatisme d'une femme tout en colère contenue et dignité blessée.http://www.lunion.presse.fr/article/marne/operee-14-fois-les-chirurgiens-juges-coupables
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