Hier, face à ses accusatrices, en dépit de nombreux témoignages de clients, d'hôtesses… Maria Goncalves Da Conceicao, accusée notamment de proxénétisme courant 2006-2009, n'a cessé de nier les faits.
LES clients - nombreux - ont été entendus. Les filles ont parlé… Les langues se sont déliées hier après-midi. On a parlé masturbations, fellations, relations sexuelles plus poussées… le tout sur fond d'alcool, de drogue et d'argent. Maria Goncalves Da Conceicao, 54 ans, gérante du Cupidon depuis 2003, s'est retrouvée à la barre du tribunal correctionnel de Châlons-en-Champagne, à la suite d'une… dénonciation.
Hier, les trois petits salons du Cupidon, ce bar de nuit de la rue de Sézanne, ont finalement livré leurs secrets inavouables. Des filles qui poussaient à la consommation, des bouteilles de champagne qui s'échangeaient entre 145 et 300 euros, des hommes qui savaient ce qu'ils auraient en échange : des relations intimes avec des filles qui n'avaient pas vraiment le choix… Des témoins qui diront tous la même chose : c'était de notoriété publique à Epernay. A la troisième bouteille, les faveurs tombaient !
« Ça faisait longtemps que ça se savait. Ça faisait 20 ans que ça existait ! ». Hier, deux jeunes filles, victimes dans cette affaire, ont osé braver l'interdit et faire face à leur tenancière. Elles ont parlé sans tabou des relations sexuelles qu'elles avaient avec les clients. Elles ont rappelé les consignes de la gérante de « venir en minijupe, sans culotte », de « faire tomber les bouteilles », de « faire du chiffre ».
« Elle savait tout, elle venait même dans les salons avec nous. Même elle, elle se faisait toucher… Et nous, si on refusait, on avait des avertissements. Certaines filles ont été virées parce qu'elles refusaient toute relation sexuelle. » Le dossier est accablant, les témoignages sont nombreux et concordants. Pour autant, Maria Goncalves nie les faits. Elle n'a rien vu, rien entendu. Elle n'a rien fait que la morale réprouve.
« C'était une maison propre »
Vêtue d'une veste cintrée crème, d'une étole beige et d'un pantalon noir à petits carreaux, les cheveux coupés courts, la gérante du bar a fait face aux magistrats. De sa petite voix, elle a fait celle qui ne comprenait pas ce qu'elle faisait là.
« Je tombe de haut. Mes instructions ont toujours été claires : jamais de débordement chez moi. » Et de le marteler tout au long de l'audience. « Jamais je n'ai autorisé de tels actes chez moi. Jamais je n'aurais toléré de tels actes. S'il y a eu des choses, c'était derrière moi. J'avais une totale confiance en mon personnel, jamais je ne les aurais cru capables d'un tel comportement. Ma maison, c'était une maison propre. J'ai d'ailleurs viré des filles qui avaient de mauvais comportements. Sur le champ ! »
Le dossier est lourd de plus de 1 300 pages. Une quinzaine d'employées, plus encore de clients, ont évoqué les mêmes faits, le même spectacle…
Passée la honte et les pressions, deux jeunes filles d'une vingtaine d'années ont fait face à Maria. « Tout ce qu'elle dit est faux. Le client, il savait quand il venait au bar ce qui se passait dans les salons. Nous, on devait faire tomber des bouteilles, vider les coupes pour qu'il en remette une autre… et lui, il commençait à toucher. Si une fille ne travaillait pas, elle ne restait pas longtemps. »
« On se faisait disputer si on ne faisait rien », ajoute cette autre jeune femme. « J'ai eu un premier avertissement, un deuxième… Plus d'argent, plus rien, il fallait bien que je paye mon loyer. » Un loyer que certaines ne pensaient pas avoir à payer si cher, car justement logées au- dessus du bar. « J'habitais en haut, je voyais personne, elle ne nous ouvrait pas. Parfois, on restait enfermées de 4 heures à 16 heures. »
« C'est elle qui a mis fin au système »
Car voilà, outre le fait de se livrer à des actes de proxénétisme, Maria Goncalves gardait les filles sous clés, oubliant parfois de leur ouvrir pendant 24 heures… Me Leroy, pour deux des parties civiles, évoquera « des conditions d'hébergement dignes d'une maison close ». Me Legay et Me Plagne, représentant deux autres victimes, insisteront sur « les pressions » dans ce dossier pour « faire taire les victimes ». Pour la défense de Maria Goncalves, Me Ognami contestera la « qualité de victimes » des jeunes hôtesses. « Jamais elles n'ont été séquestrées ! Elles pouvaient s'échapper ! De quoi parle-t-on là ? De quelles pressions ? Aujourd'hui, on nous dit que ça fait 20 ans que ça se savait ? Ma cliente était là depuis 6 ans ! Elle doit payer pour tout un système qu'elle ne connaissait pas ? Et le premier magistrat, lui, il était au courant ? Tout le monde dit que c'était de notoriété publique… Ma cliente n'a commis aucune infraction. Elle n'était pas au courant des agissements de ses hôtesses ! » Pour l'avocat, la victime, c'est elle : « C'est elle qui a mis fin au système en place. Elle ne cautionnait pas ce qu'il se passait avant ! S'il se passait quelque chose, c'était dans son dos. Dans cette affaire, c'est son honneur qui a été bafoué ». Et d'insinuer, « une possible vengeance, un règlement de comptes ».
Pour le parquet, le doute n'est pas permis, les infractions sont « graves », passibles de 7 ans d'emprisonnement. Et de requérir 36 mois dont 18 mois avec sursis et 15 000 euros d'amende. L'affaire a été mise en délibéré au 19 octobre
http://www.lunion.presse.fr/article/marne/tribunal-correctionnel-epernay-laffaire-du-cupidon-lhistoire-dune-maison-close-echange
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