Beaucoup de questions et aucune réponse, aucune certitude mais des hypothèses. Plus de 24 heures après la découverte d’un tunnel donnant accès à l’intérieur de la banque, les auteurs courent toujours. Les policiers n’ont aucune piste sérieuse.
QUI sont-ils, ces voleurs qui ont, avec un certain culot, il faut tout de même mettre ça à leur crédit, tenter de commettre le casse du siècle? Des professionnels, des amateurs? Sans doute pas des primo-délinquants mais pas des membres du grand banditisme. Les policiers en charge de l’enquête, après avoir communiqué lundi sur cette tentative de cambriolage avorté, souhaitent garder farouchement secret les indices en leur possession.
Il faut bien l’admettre, les apprentis Spaggiari laissent derrière eux des tas de questions. Nous avons emprunté le chemin qu’ils ont parcouru.
De longs jours d’effort
Pour accéder à la banque, ils se sont introduits par l’arrière du magasin désaffecté, donnant rue de l’abbaye d’Isle. Comment ont-ils fait? Ils ont probablement posé une échelle sur le rideau de fer pour enjamber les barbelés.
Une fois, dans la cour longeant des bâtiments désaffectés, ils ont ouvert, grâce au commutateur, le rideau métallique afin de rentrer leurs outils. Ils ont ensuite court-circuité le commutateur pour empêcher toute personne d’entrer. Samedi, les propriétaires Jaillant n’ont d’ailleurs pas pu entrer (lire page ci-contre).
Les voleurs n’avaient plus qu’à forcer la porte de la réserve de ce commerce familial, puis à parcourir un dédale de couloirs avant d’accéder aux caves, sur deux niveaux, dont l’entrée se fait par un étroit escalier en fer, situé juste derrière l’ancienne entrée du commerce, rue d’Isle.
Là, au premier sous-sol, dans une pièce d’environ 10 m2, ils ont commencé à creuser un passage dans le mur de briques, puis de pierres, avec visiblement des outils non professionnels.
Combien de temps? De longs jours. Ils ne craignaient pas d’être entendus, car dans le quartier, depuis quelques semaines, les chantiers se multiplient et le voisinage est souvent dérangé par des ouvriers qui percent des tranchées.
Impossible de creuser à deux de front
Spaggiari a toujours dit, lors de son casse à Nice en 1976, que le plus dur avait été d’évacuer les gravats. Ces imitateurs les ont d’abord entreposés sur des armoires, puis expédiés dans les souterrains du deuxième niveau.
Ils ont réussi à construire un tunnel de plusieurs mètres, en forme de coude. Les malfrats ont dû se relayer. Impossible de creuser à deux de front, le tunnel ne pouvant être parcouru qu’accroupi, d’après ce que nous avons constaté. Il débouche dans un couloir de la banque, qui servait d’archives. Les voleurs n’ont neutralisé aucune alarme. Alors que rien ne les empêchait de faire un petit tour dans les locaux, ils ne se sont pas aventurés plus loin. Après des jours d’efforts, ils ont rebroussé chemin. La salle des coffres-forts de la banque, selon nos informations, se trouve à plusieurs dizaines de mètres de l’endroit de la fin de leur tunnel. Lequel a été découvert lundi, en fin de matinée, par un employé qui a donné l’alerte.
«C’est hallucinant», lâche, surprise la fille des propriétaires Jaillant qui nous fait visiter les lieux. «Je suppose que la police technique et scientifique a déjà tout examiné mais avec tout ce chantier, on se demande s’ils ont trouvé grand-chose.» Des outils? Des traces de campings sauvages, des traces ADN, des empreintes digitales? Les enquêteurs gardent farouchement le mystère.
Aurélie BEAUSSART (abeaussart@journal-lunion.fr)
«J'ai un coffre ici, je veux la vérité»
L’accueil est un peu crispé mais cependant cordial, du côté des employés du Crédit du Nord, rue d’Isle à Saint-Quentin, hier matin. Pour le premier jour d’ouverture au public de l’établissement bancaire depuis la découverte de l’étrange visite, le personnel «briffé», renseigne sommairement les clients inquiets.
Quant aux curieux journalistes: «Malheureusement, on ne peut vraiment pas vous montrer la salle dont il s’agit, ni répondre à vos questions, désolé.» Mine contrite rapide avant de passer au suivant dans la file d’attente.
Il s’agit d’un client, d’un bon client visiblement et qui semble assez contrarié: «J’ai un coffre ici, j’ai entendu à la radio que des voleurs se sont introduits dans la banque en creusant un tunnel, je veux savoir la vérité. Est-ce que mon coffre a été vidé?»
L’employée au guichet d’accueil a un discours efficace, accompagné de gestes d’apaisement. En quelques mots, elle rassure le client, parle d’une tentative de vol, certifie que les voleurs s’en sont pris uniquement à la salle des archives, une sorte de débarras où rien d’important ne serait entreposé, avant de lui proposer un entretien personnel, sans doute avec un conseiller. Une femme qui attend son tour, visiblement pas au courant, s’exclame, surprise : «Qu’est ce que c’est que cette histoire de tunnel?»http://www.lunion.presse.fr/article/aisne/le-bel-echec-des-apprentis-spaggiari
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