Amaigri mais rempli d’allégresse, le cheveu devenu rare mais "heureux" : hier matin Abderrahim El Jabri a pris son temps pour sortir de la prison du Pontet, près d’Avignon (84), sous les applaudissements de sa famille et des familles de détenus. Après 13 ans "et trois jours" derrière les barreaux pour le meurtre - qu’il a toujours nié -, d’un trafiquant de haschisch en 1997.
Arborant le “V” de la victoire, il a rempli goulûment ses poumons de "l’air de la liberté", a multiplié les embrassades, avec sa famille, notamment ses sœurs. Un peu perdu, il a fait spontanément une déclaration. "Vive la liberté ! Je suis sorti dans le cadre d’un aménagement de peine", a-t-il immédiatement précisé sous les rais d’un soleil printanier. "J’attends impatiemment la procédure de révision. C’est une guerre qu’on mène, un combat très long. Je n’ai pas de haine et je ne suis pas dans un esprit de vengeance. Mais dans une quête de liberté et de vérité." La nuit d’avant sa libération, "excité", il a peu dormi.
Abderrahim El Jabri "Mes premières pensées vont à ma mère et à mon père, décédé il y a un an, qui a dû vendre sa petite maison pour m’aider. À l’avocat général : c’est grâce à lui, un peu, que l’on s’achemine vers la révision du procès." Un peu plus tard, il se confiera davantage : "Je suis rentré en prison à 32 ans. J’en sors à 45 ans : je suis fatigué. Et j’appréhende la vie quotidienne. J’appréhende “dehors”."
Très vite, El Jabri devra honorer plusieurs obligations : travailler. Ce sera le cas puisqu’il a signé un CDI dans une entreprise de maçonnerie à Lille. Il devra rembourser ses victimes et ne pas se rendre dans le département de l’Hérault.
Yeux brillants, sans aucune acrimonie dans la voix, il promet qu’avec Abdelkader Azzimani, condamné et libéré comme lui, mais en janvier 2009, pour le même meurtre qu’ils nient, "nous demanderons une indemnisation à la hauteur de ce que nous avons enduré : un crime que nous n’avons jamais commis. On ne va pas baisser les bras. Mon père a vendu sa petite baraque pour m’aider. Un sacrifice. On dit souvent que ce qui ne tue pas nous rend plus fort. C’est peut-être vrai mais j’ai souffert et je m’attends encore à souffrir de la prison, même dehors".
Des trémolos dans la voix, sa compagne, Seloua, renchérit : "Je suis heureuse. Il a tenu le coup." Avant de se jeter, enfin libre, dans les bras de son ami Abdelkader Azzimani.
http://www.midilibre.fr/2011/04/26/el-jabri-respire-la-liberte,310005.php
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